LES HUIS CLOS EXOTIQUES DE PASKUA

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"A Paskua qui définit son travail comme " un art pétulant, dansant, moqueur, enfantin, bienheureux ", il faudrait oser rétorquer qu'il n'en est rien, que sa création est tout sauf pétulante, dansante, moqueuse, enfantine... Et bienheureuse ! En effet, comment relier ces adjectifs à des œuvres certes figuratives, mais dont les linéarités signifiantes ne sont pas toujours évidentes ? Qui ont les récurrences obsessionnelles de celles de l'Art brut. Dans lesquelles l'artiste, ancré dans une volonté d'originalité et de sincérité, s'est débarrassé, comme tous les artistes Singuliers, des canons de la peinture classique ; et use sans limites de sa liberté, voyageant picturalement en une démarche où règne le plus complet onirisme. Boulimique, pourrait-on dire, de remplir l'espace pour exprimer ce qui s'agite en lui. A tel point que, bien souvent, cet espace peut être assimilé à un huis clos végétal où le créateur a du mal à ménager la moindre respiration. L'œuvre de Paskua est, en effet, une conjonction de plantes anomales et endogènes, aux tiges raides parfois parallèles, le plus souvent arborescentes ; issues de ventres/substrats hors du champ du tableau, mais néanmoins soutènements de l'entièreté de l'œuvre, leur " présence " attestée par la floribondité des végétaux. Lesquels se ramifient en faisceaux qui se regroupent, entrelacent leurs complexités, générant au cours de leur montée, des îlots ou point la vie. Car c'est bien d'éléments de vie qu'il s'agit, statiques mais omniprésents, au gré de ces formes et ces non-formes : Comme si ce qui, de prime abord, semblait uniquement floral, recélait en fait, recluses dans les moindres enchevêtrements, des forces naissantes évocatrices d'une existence " humaine " : embryons anthropomorphes peut-être, visages assurément... éperons/phallus, fleurs/cœurs, pétales/têtes, béances/vulves... Et puis, sur des bas-reliefs, tel l'aboutissement de ces accouplements, d'enfantins bonshommes têtards : un miroir polymorphe, incertain et fallacieux : les moyens pour, et les fins d'affirmer cette vie, en somme. Tantôt directement " lisibles ", tantôt à peine émergés du magma composé par le peintre. Tellement dense que parfois, accroché au bois vermiculé mais régénéré par l'intervention créatrice de l'artiste, ce magma se bosselle, mamelonne, au gré du pinceau lourd de vouloir en rendre les reliefs. D'autres fois, incapable de s'appendre aux saillies, aux granulations des supports, il dégouline entre les " plantes " pour revenir vers la " terre " ! De sorte que Paskua, en une double gestuelle, s'élève " avec ses végétaux " dans l'affirmation de son être ; et retombe " avec ses dégoulinures " qui semblent, par leurs formes aléatoires et leurs croulements incoercibles, vouloir lui garder présentes la délitescence de l'esprit au fil des illusions perdues, la dérive de l'individu vers la mort, l'impossibilité pour lui de retenir, même un instant, le passage du temps. Les titres eux-mêmes, par leurs antinomies, les images qu'ils véhiculent... corroborent cette quête des sensualités et des désenchantements subséquents (" Floraisons du silence ; Un peu de chaos libre et venteux ; Yeux fougères presque charbon, presque flamme, presque flots ; sources de la nuit baignée de lumière ; Tout l'au-delà est dans cette vie... "). Les plus imprévus étant ceux où l'artiste semble opérer un dédoublement, se séparer de cet environnement ; ou, au contraire, tenter d'en être maître (" Laissez-la dormir au bas de mon sommeil ; Mes flots unis à ses vagues... "). Mais, tout compte fait, cette attitude est-elle tellement surprenante ? Des années passées sous les tropiques où il a choisi de vivre, Paskua, ne veut-il pas, par la luxuriance de son œuvre, attester de son désir d'assimiler l'atmosphère de l'île en peignant sur les bois flottés et autres rejets de la mer ; en utilisant les anomalies de la terre, vitrifiant par exemple des termitières, symboles des grouillements qu'il a lui-même créés ? En même temps ne témoigne-t-il pas, par la sobriété paradoxale imposée à ces luxuriances, et puisque son travail n'a rien d'ethnologique, rien de " témoin de son temps " ou de la société qu'il côtoie, que restent présentes en lui, les mémoires d'autres lieux rencontrés au cours des errances qui l'ont amené jusqu'ici. Quelle que soit la réponse, sa préoccupation consiste à " SE " chercher dans les traces de vie primales, avec tant d'intensité qu'il " SE" dépose sur chacune de ses oeuvres, sous la forme d'une picto-signature ! Et c'est ainsi que, de ses entités liées à des surabondances sylvicoles, à ses ébauches d'individus ; de ses enfermements plaqués sur le bois comme autant d'univers fantasmatiques, à ses présences jetées comme des escales, Paskua travaille d'arrache-pied, choisit son " dit " au gré d'évolutions, de rythmes qui lui conviennent, d'enchaînements profus qui le font rêver. Subséquemment, conscient de cette marche du créateur vers lui-même, comment le spectateur ne percevrait-il pas sous la lourde dentelle des entrelacs picturaux, sous la douceur et l'harmonie des couleurs qui les conjuguent, le questionnement personnel incessant, le mal-être de cet artiste que ne saurait " guérir " aucune latitude. Alors, " pétulante, dansante, moqueuse, enfantine, bienheureuse ", la création de Paskua ?..."

Jeanine Rivais

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PASKUA'S EXOTIC CLOSED DOORS.

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To Paskua writing that his work is " an exuberant, dancing, mocking, childish, happy art", one should dare to retort that it is nothing of the kind ; that his creation is everything but exuberant, dancing, mocking, childish… And happy ! Indeed, who would link these adjectives to works, admittedly figurative, but in which significant linearities are not always evident ? Which have the obsessional recurrences of Outsider Art's. In which the artist, firmly fixed in a will of originality and sincerity, has, like all Outsider artists, got rid of the canons of classical painting, giving himself a boundless freedom, travelling in a pictorial reasoning where the most total fantasizing prevails. Compulsive, could one say, to fill the whole space and express what is stirring in him. So much so that very often, this space may be assimilated to vegetal closed doors, in which the painter seems unable to let the slightest breathing. Paskua's work is, in fact, a mixing of anomalous and endogenous plants, with stiff and sometimes parallel stems, more often than not arborescent ; born from substratum/bellies situated off the picture-scope, but nevertheless retaining the whole work, their "presence" attested by the plant-floridness. These plants branch out into bundles which group together again, intertwine their complexities ; breeding in their ascent, islets where life peeps. For Paskua's painting is all about elements of life, static but omnipresent, according to these shapes and no-shapes : as if what looked, at first glance, solely flowerlike, harboured in fact, enclosed in the least entanglements, budding forces suggestive of "human" presence : anthropomorphous embryos, maybe ; faces, most certainly… phallus/spurs, heart/flowers, head/petals, gap/vulvas… And then, childish tadpole little men on bas-reliefs, as the outcome of these matings : a polymorphic, uncertain and deceptive miror : in short, means for, and aims to prove that life. Now, easy to "read. Now, hardly emerging from the magma elaborated by the painter with the heavy paintbrush working bit by bit to convey its reliefs ; badly dented, and hillocky ; thick to the point of clinging to the vermiculated planks regenerated by the artist's creative intervention. At other times, unable to keep hanging from the support projections, from its grainy surfaces, it drips between the "plants" and slides down to the "ground" ! So that Paskua, in a double movement, raises "with his plants", in the assertion of his being ; and falls down "with his drippings" which, by their uncertain forms and uncontrollable collapses, seem to want and keep present to him the cleaving of spirit with lost illusions going by, man's drifting towards death, the impossibility for him to hold back, even for a moment, the passing of time. The very titles, by their antinomies, the pictures they convey… corroborate this search of sensuousnesses and subsequent disillusionments ("Flowerings of silence", "A bit of free and windy chaos", "Fern eyes almost coal, almost flame, almost waves", "Springs of the night bathed in light", "The whole beyond is in that life"…) The most unexpected, being those in which the artist seems to carry out a dual personality, to split from this environment ; or, on the contrary, try to master it ("Let her sleep at the bottom of my slumber", "My flood linked to her waves"…). But, all things considered, is this attitude so surprising ? From his years spent in the tropics, doesn't Paskua want, through the luxuriance of his work, prove his will to assimilate the atmosphere of the island, by painting over floated woods and other sea-discharges ; by using land-anomalies, for instance glanzing termites'nests, symbols of other swarmings he himself created ? Meanwhile, doesn't he give painted evidence, through the paradoxical simplicity imposed on these luxuriances, and since his work is neither ethnological nor a "witness of his time" or of the society he mixes with, that he keeps fresh in his mind, memories of other places accosted along his sea-wanderings, and which had him sail this far ? Whatever the answer, his preoccupation consists in searching for "him" in the primal signs of life, with such intensity that he confirms "his" presence on each painting, in the guise of a picto-signature !

And so, from his entities tied to foresty profusions, to the rough drafts of his characters ; from his isolations plated all over the wood like many-sided fantastical universes, to his presences sown like as many touchdowns, Paskua relentlessly paints, chooses his "saying" along with evolutions, rythms that suit him, and with profuse sequences that have him dreaming.

Subsequently, conscious of the creator's move towards himself, how would the viewer not perceive, under the heavy embroidery of pictural interlace, under the softness and harmony of the colourings that combine them, the unremitting personal questioning of this artist, his disquiet that no latitude could ever "cure".

Then, "exuberant, dancing, mocking, childish, happy", Paskua's creation ?

Jeanine Rivais.

 un autre artiste

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